LA QUESTION DE L'EXCLUSION

L'exclusion : elle consiste à rejeter de la congrégation un Témoin, qui est jugé par le collège des Anciens comme ennemi de Jéhovah. Concrètement, l'ex-Témoin ne pourra plus avoir aucune relation avec tous ceux qu'il connaissait et qu'il aimait, y compris les membres de sa famille qui seront les seuls cependant à avoir le droit de le saluer et à parler de la pluie et du beau temps, s'ils le souhaitent. Un Témoin qui parle à un exclu sera lui-même exclu s'il persiste. Comme tout Témoin est sensé avoir cessé de fréquenter toutes personnes non Témoin, il s'en suit une très profonde solitude pour l'exclu. Cela constitue un très puissant moyen de maintenir dans la secte nombre d'âmes qui auraient quelques doutes. Et cela pousse beaucoup d'exclus à tout faire pour retourner dans la secte : on ne leur a jamais appris à trouver en eux-mêmes la force de faire face aux problèmes de l'existence, toute confiance en soi du Témoin moyen repose sur la Bible (interprétée à la sauce TJ), et sur le sentiment d'appartenir à l'organisation des Témoins de Jéhovah : un TJ n'a de valeur personnelle qu'en tant qu'il est membre de l'Organisation des Témoins de Jéhovah, instrument dans les mains de "Jéhovah". Par lui-même, il n'est que péché, ignorance et absurdité. Pour être à nouveau admis parmi les TJ, l'ex-adepte devra d'abord cesser toute activité ayant été à l'origine de son exclusion, se repentir (II Cor. 2:6,7), accepter d'être contrôlé par le "comité judiciaire". Et enfin, il devra retourner à toutes les réunions publiques (4 heures par semaines) pendant au moins un an, en se plaçant tout au fond de la salle, en arrivant cinq minutes après le début et en partant cinq minutes avant la fin (ce qui correspond aux moments de prière), afin de ne pas avoir à saluer les autres TJ…

Les motifs d'exclusions sont :

A la lecture de la Bible, et si en particulier on prend au sérieux et au premier degré les Epîtres de Paul, la pratique de l'exclusion semble avoir été commandée par l'apôtre. Si on s'en tient à l'Evangile, les hommes ne sont pas habilités à juger leurs semblables. Et s'il y a malgré tout des discordes, liées à la conduite des uns et des autres Mat. 18:15-22 conseille à celui qui se croit offensé de chercher à discuter avec l'autre pour essayer de s'entendre, quitte à faire intervenir d'autres frères, et si malgré tout cet autre persiste malgré l'avis de plusieurs frères, il est tout simplement conseillé de ne plus le fréquenter. Le bon sens parle ici : si une personne que vous considériez comme votre frère vous offense, par sa conduite ou par ses paroles, le mieux à faire est de ne pas persister à la fréquenter. Il n'est pas question ici d'un rejet par toute la communauté des chrétiens. Et quoiqu'il en soit, il est demandé de pardonner à ceux qui nous offensent jusqu'à "77 fois" ce qui signifie indéfiniment (car aucun chrétien n'est assez stupide pour comptabiliser tous les manquements de ses proches). En conséquence, aucune cessation de fréquentation de celui qui est cause de discorde ne doit avoir de valeur définitive, il s'agit simplement d'un statu quo qui n'est appelé à durer que tant qu'il y a mésentente entre deux frères. Il s'agit simplement de savoir arrêter de se quereller à temps, de ne pas continuer à mettre de l'huile sur le feu en continuant de se fréquenter.

Enfin, dans son fameux Sermon sur la Montagne, Jésus dit "Vous avez entendu qu'il a été dit : tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien moi je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs, afin de devenir fils de votre Père qui es aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. Car si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? Les publicains eux-mêmes n'en font-ils pas autant ? Et si vous réservez vos saluts à vos frères, que faites-vous d'extraordinaire ? Les païens eux-mêmes n'en font-ils pas autant ? Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait" (Matthieu 5 : 43-48).

Cela semble assez peu en accord avec Paul qui, n'ayant jamais connu le Christ de son vivant et s'étant lui-même proclamé "apôtre des Nations", se prétendait en droit de "livrer à Satan" quiconque ne voyait pas les choses comme lui (I Tim. 1:20). Il serait bon de rappeler ici au Témoin sincère mais souvent désinformé que les Ecrits de l'apôtre Paul n'ont été lus et éventuellement appliqués que par les membres des communautés qu'il avait fondées : les autres communautés fondées par d'autres apôtres ne suivaient pas les façons de voir de Saül de Tarse qui s'entendait très mal avec les autres apôtres. D'ailleurs Paul ne s'en cache pas, il traite à différents moments les autres apôtres d'hypocrites et de mauvais chrétiens (II Corinthiens 11:5-26). Il ne faut pas oublier que Paul avait été un fanatique : il avait participé à la lapidation d'Etienne, avant de devenir lui-même chrétien. S'il a changé de perspective religieuse (il faisait au départ partie de la secte des pharisiens), il n'a jamais changé de méthode, ignorant en grande partie le message d'amour de Jésus, ou le réinterprétant dans un sens complètement abstrait (alors que Jacques dit que la foi sans les œuvres est morte, Paul dit que ce qui compte, ce ne sont pas les œuvres mais la foi, Rom. 3:27,28). Un fait intéressant à noter au sujet de ce prétendu apôtre est qu'il se vante à plusieurs reprises de jouir de la citoyenneté romaine, alors qu'en même temps il se dit "Juif", originaire de Tarse. Or il était à l'époque impossible d'être officiellement juif et citoyen romain : on ne pouvait adorer Jupiter et Yahweh en même temps. Où est l'erreur ? Sur la personnalité et les motivations réelles de l'apôtre Paul, je conseille "L'incendiaire, vie de Saül de Tarse" de Gérald Messadié, chez Robert Laffont et en particulier la partie consacrée aux sources documentaires de son roman historique.

Quoiqu'il en soit, l'autorité de Paul comme écrivain faisant partie du Canon de la Bible date du IVème siècle. Qui a décidé que les Ecrits de Paul devaient faire partie de la Bible ? Ce n'est pas Jéhovah qui un beau jour a dit "dans Mon Livre, vous mettrez les Epîtres de Paul", ce sont les pontifes catholiques qui l'ont décidé au IVème siècle après Jésus Christ. Et pour cause ! Quand il s'agissait à l'époque de lutter contre les "hérésies" comme l'arianisme, qui enseignait que Jésus n'était qu'un homme, et parce qu'il fallait s'assurer d'un pouvoir sans faille sur les esprits, les écrits de Paul se révélèrent d'une valeur politique exceptionnelle : on pouvait mettre hors jeu, excommunier, bannir, tous ceux qui ne se pliaient pas à l'ordre idéologique établi, au nom même de celui qui enseigna l'amour, par l'intermédiaire d'un Paul bien utile.

Mais si l'on tient cependant absolument à considérer Paul comme un "canal de Dieu sur Terre" au même titre que Jésus et les autres apôtres (choisis par lui de son vivant), force est de constater que la Watch Tower fait preuve de beaucoup de zèle pour ajouter de nouvelles rubriques à la liste des motifs d'exclusion. Ceux-ci sont contenus dans les Lettres de Paul : I Cor. 5:11 : "Je vous écris de cesser de fréquenter celui qui, appelé frère, est fornicateur, ou avide, ou idolâtre, ou insulteur, ou ivrogne, ou extorqueur" et Rom. 16:17 : "Je vous exhorte maintenant, frères, à avoir l'œil sur ceux qui causent des divisions et des occasions d'achoppement, à l'encontre de l'enseignement que vous avez appris, et évitez-les." Et I Tim. 1:20 :"Hyménée et Alexandre appartiennent à ceux-là, et je les ai livrés à Satan pour qu'ils apprennent par la discipline à ne pas blasphémer."

Que constate-t-on à la lecture de ces versets ? Que les motifs d'exclusion sont assez limités : fornication, avidité, idolâtrie, insultes répétées, ivrognerie, escroquerie et dans une certaine mesure ce que les TJ appellent "apostasie" qui consiste à enseigner autre chose que ce qui a été appris par les premiers chrétiens, à la suite de l'enseignement du Christ (mais le fait d'enseigner par exemple que 1914 est la date du commencement de la fin, n'est-il pas autre chose que ce que les premiers chrétiens avaient appris ?) et enfin le blasphème.

L'interprétation du sens de certains termes, en particulier celui de fornication ou d'idolâtrie, laisse beaucoup à désirer et est très discutable mais malgré les incertitudes de vocabulaire (quand on sait que les apôtres s'exprimaient essentiellement en hébreu et que ce n'est que plus tard que leurs écrits ont été traduit en grec), de nombreuses personnes se retrouvent aujourd'hui rejetées de leur cadre social du jour au lendemain et sont condamnées à errer comme des âmes en peine dans un monde qu'on leur a toujours décrit comme satanique.

Je mets au défi quiconque de trouver dans les Ecrits de Paul ou dans tout autre passage de la Bible, des textes prouvant que doivent être exclues les personnes :

Il n'y a tout simplement aucun texte biblique justifiant ces excès de zèle de la part de la WT, aucun texte justifiant que ces pratiques condamnées et peut-être condamnables selon une lecture littérale de la Bible méritent autre chose que de simples remontrances.

En outre le texte de II Cor. 2:6,7 montre que la procédure d'exclusion n'a pas à suivre la démarche de type totalitaire employée par les TJ notamment en ce qui concerne la réintégration des exclus : "Ce blâme donné par la majorité est suffisant pour un tel homme, de sorte qu'au contraire maintenant, vous devez lui pardonner avec bonté et le consoler, pour que de façon ou d'autre, un tel homme ne soit pas englouti en étant excessivement triste". Il nous est bien signifié ici que "l'exclusion" n'est en fait qu'un blâme provisoire contre le pécheur, prononcé par l'ensemble de la congrégation et non par un petit comité judiciaire, composé de quelques anciens utilisant un livre spécial, le "Livre des Anciens" pour juger leur frères. Au contraire, le blâme devait pouvoir être prononcé par l'ensemble de la congrégation, ce qui limite, on s'en doute, les cas d'exclusion possibles. Ensuite, il n'est pas question d'attendre au moins un an avant de réintégrer l'exclu, ni d'exiger de lui qu'il se présente à toutes les réunions publiques pendant cette période, ce qui bien sûr est très humiliant pour la personne concernée (ne pas oublier que pendant tout ce temps, personne n'a le droit de la saluer ou de lui adresser la parole), alors que le passage cité plus haut incite à beaucoup plus d'humanité envers ses semblables.

Henrique Diaz

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